[Avis] Vanille Galante - Hermès



Le nom du dernier-né des Hermessences, la série de "petits haiku" de J.-C. Ellena, avait de quoi intriguer: Vanille Galante, alors que le nez-maison d'Hermès n'avait jamais caché son aversion pour cette matière?

Une invitation à la découverte d'une autre vanille, insolite, complexe et paradoxale, comme une plante fragile après un long hiver, dont on espère qu'elle fleurira à nouveau, plus inattendue encore. L'odeur d'une fleur étrange, légère comme un alizé, qui flotte sous notre nez avec ses nuances d'épices, de cognac et de bois fumé, entre pétale et cigare, peau et cacao.


Et Vanille Galante ne perd pas de temps à déguiser son essence toute ellenienne: dès la première vaporisation, rien n'est plus loin de la langoureuse vanille à laquelle on pouvait se laisser à rêver. Si, d'ailleurs, on la juge à l'aune de l'orientalisant vanillé espéré, la déception est inévitable... mieux vaut prendre d'emblée cette nouvelle Hermessence pour ce qu'elle est: un fleuri humide, dans le plus pur style Ellena.

Notes de tête: note verte, ylang ylang
Notes de cœur: lys, notes épicées
Notes de fond: salicylates, santal, touche de vanille


Le départ est, ainsi, profondément aqueux, un peu vert et assez fruité, un melon d'eau se mêlant à une note qui, comme le faisait remarquer le Critique de Parfum, rappelle assez nettement la banane (verte!). Cette facette fruitée-humide vient, dans un mouvement très naturel, se fondre dans un cœur où domine un lys suave et léger, assez réaliste et très nettement teinté, à mon nez, des accents d'eau trouble de l'orchidée vanille.
La composition, comme la plupart des autres Hermessences, semble toute en transparence, une superposition de voiles diaphanes, aériens.

Elle se sucre légèrement au fil du temps tout en se dépouillant de ses traces fruitées, pour se concentrer sur sa tonalité florale-aqueuse aux allures discrètement exotiques. Si la vanille joue pratiquement les Arlésiennes, un simple clin d'œil brodé en filigrane dans les voiles de fleurs blanches, l'orchidée apporte une langueur mouillée qui sent les îles... au point que cette belle note florale, à peine crémeuse, épanouie mais avec mesure, suggère presque l'iode des flots. Cette touche pratiquement salée est, par ailleurs, présente dans l'odeur naturelle des lys.

C'est cette facette florale, particulièrement aérienne, qui - sur ma peau du moins - se prolonge jusqu'en fin de tenue, perdant au passage ses nuances aqueuses. Du santal, de la vanille même (!) annoncés dans la composition officielle, je ne sens que les plus légères traces... ce sont les salicylates et leurs accents fleuris qui dominent. Bravo, d'ailleurs, à la maison Hermès, pour oser la transparence en mettant ouvertement en avant une molécule artificielle!

Eau de toilette comme toutes les Hermessences, le sillage est bon, et la rémanence m'a paru satisfaisante (plusieurs heures au moins, et plus durable a priori que la moyenne de la collection).


Sur le papier, l'association au cœur de Vanille Galante - lys et évocation d'embruns - pourrait faire penser au Lys Méditerranée de Frédéric Malle, comme d'ailleurs le mariage du lys et de la vanille à Un Lys de Lutens, voire même - pour l'orchidée vanille - à L'Eau des Vanilliers de L'Occitane... mais cette dernière Hermessence s'en distingue très nettement. Elle reste, d'abord et avant tout, un parfum-aquarelle typiquement ellenien, dans la droite ligne de la série des Jardins d'Hermès par son côté "nature humide". Elle y ajoute en plus une subtilité, un raffinement intellectuel certains dans la composition, chaque note répondant très spirituellement à l'autre - un vrai plaisir pour l'amateur de parfums que de se plonger dans cet exercice de style!

J.-C. Ellena déclarait récemment au Nouvel Obs: "Je suis connu pour ne pas utiliser la vanille car les contraintes de prix me forceraient à opter pour de la vanilline, une molécule de synthèse à l'odeur banale et paresseuse. Dans le prochain Hermessence (février 2009), j'ai pu travailler un absolu de vanille sans avoir à me soucier de son coût".

Ce haiku-ci est, effectivement, tout sauf banal et paresseux - mais il ne parle pas de vanille. Amoureux de la note, amateurs d'orientaux et de gourmands, passez donc votre chemin sans regrets!
Si, par contre, vous aimez la senteur des lys ou de l'orchidée, si la récente vogue des parfums de jardins sous la pluie vous ravit, ne manquez pas Vanille Galante: c'est l'un des plus beaux représentants du genre, et une vraie réussite.



Maison: Hermès
Créateur: Jean-Claude Ellena
Année de création: 2009
Famille: floral
Disponible en eau de toilette, vapo
100 ml (170 EUR), vapo 100ml fourreau cuir, coffret de 4 vapos de 15ml. Uniquement dans les boutiques Hermès.


Images: Hermès, Tropicalflore

2 commentaires:

Anonyme a dit…

tres belle review de vanille galante,
c'est un parfum tout en "voile", effet diaphane des le debut, sur la mouillette une vanille douce cremeuse non sucrée, sur la peau les notes jasmin ylang irradient en douceur a travers le voile de vanille, c'est comme une creme , un chocolat blanc, mais pas de sucre a outrance, la vanille ne s'impose pas, elle se devine, elle est le liant du jasmin (tres effacé) et de l'ylang plus present
c'est un parfum joyeux, lumineux grace a ces senteurs fleuries tiaré un peu, mais aussi doux, limite enfantin, pour moi un parfum de petite fée

parfum de peau, léger, trop peu présent.... une "eau"......

Pas de banane à mon nez.....j'aurais aimé la sentir, peut-être que j'aurais préféré.... (comme dans Sira des Indes )
mais la fin du voyage m'empêche de l'acheter pour la porter,une note tres iodée apparait sur ma peau, et ça les odeurs iodées, je peux pas, totalement repulsif pour moi

Six' a dit…

Véro,

Je crois qu'on a à peu près le même ressenti... il y a effectivement une onctuosité crémeuse dans VG, sans qu'elle vire au gourmand.
La note iodée, contente que tu la perçoives aussi, j'avais peur que mon nez ne me joue des tours! J'ai vraiment eu l'impression d'une évocation, d'une suggestion de la mer, sans que le parfum ne vire réellement à l'ozonique iodé...