[Avis] Nuit de Cellophane - Serge Lutens


Les deux dernières sorties de Serge Lutens, l'été dernier, avaient été de grands crus: le divin Serge Noire, qui a fini par devenir mon préféré de la maison, et le raffiné El Attarine, absolument pas à mon goût mais d'une qualité indiscutable. Deux parfums d'une foncière originalité, d'accès à tout le moins escarpé, remarquables dans tous les sens du terme. Et qui résumaient, chacun à leur manière, l'esprit de la parfumerie de Serge Lutens.
 
Autant dire que cette nouvelle sortie était attendue avec impatience: serait-il possible de se maintenir à un tel niveau?
 
La réponse est tombée, sous la forme de Nuit de Cellophane
Un parfum où il est question d'osmanthus, de jasmin et de mandarine, sur fond de nuit étoilée - autant dire un contrepied absolu aux deux précédents.
 
 
Notes de tête: notes vertes, mandarine
Notes de cœur: jasmin, osmanthus de Chine, œillet, lys
Notes de fond: muscs, amande, bois, miel

(plus, selon d'autres sources: santal, myrrhe, civette et castoreum)
 
 
On me l'avait dit, je n'avais pas voulu le croire, mais l'évidence s'impose, en deux mots: J'Adore.
Sans aller jusqu'à la copie - loin de moi cette idée - force est de constater un air de famille entre ce dernier opus et le best-seller de Dior...
 
Qu'a-t-il donc pu se passer chez Lutens? Je n'y entends goutte.
 
En ouverture de cette Nuit de Cellophane, une note d'abricot très nette, jolie, nuancée de mandarine à peine acidulée, juste un peu trop mûre. 
Derrière ces abords ouvertement fruités se laisse déjà deviner une touche de fleurs blanches... et l'ensemble rappelle un peu - hélas - l'odeur d'un shampooing (!!)
 
Et puisqu'on avait surtout parlé du dernier Lutens en termes de "travail sur l'osmanthus", remettons les pendules à l'heure: on est beaucoup plus, ici, dans l'évocation de l'osmanthus, par touches fleuries-abricotées, que dans la restitution réaliste. Point non plus de surdose voulue d'une matière-reine, comme dans tant de joyaux de la maison: le jasmin s'affiche au moins à parts égales, un jasmin léger et résolument floral, sans les facettes animalisées, voire charnelles, qu'il peut présenter - À la nuit est loin! 
 
La note d'abricot, joliment teintée de myrrhe, se prolonge solidement sur un cœur floral blanc, très fondu, où se laisse toutefois deviner une rondeur épanouie de fleurs blanches exotiques (du champaca?), et une certaine verdeur de tubéreuse (bien timide, et que je n'aurais pas identifiée sans l'avis de Grain de Musc!).

Ces aspects fruités et moelleux finissent par s'envoler au fil du temps, et dans la seconde partie de la - fort linéaire - évolution, ne reste plus alors sur la peau que ce fleuri blanc léger, sans grandes nuances et, à mon nez, assez synthétique, qui se termine en musc blanc propret. Un musc pâle, mais d'une telle intensité - soulignons le très solide sillage, et la bonne rémanence - qu'il doit étouffer toute velléité du fond amande-miel-bois promis de se manifester...


Que dire?
Une chose est sûre: Nuit de Cellophane ne risque pas de faire fuir les foules autour de vous comme une Tubéreuse Criminelle ou un Muscs Koublaï Khan. Contrairement à nombre de références de la maison, il est parfaitement accessible, simple à porter... et sans grande personnalité. Je n'y trouve aucune des particularités si exigeantes, parfois, mais si attachantes de la parfumerie de Serge Lutens.
C'est, au final, un parfum grand public, un assez joli fleuri-fruité, fort agréable et qui devrait beaucoup plaire.
Personnellement, je crains qu'il ne me laisse indifférente.


Maison: Serge Lutens (gamme export
Créateur: Christopher Sheldrake et Serge Lutens 
Année de création: 2009
Famille: floral-jasmin
Disponible en Eau de Parfum, vapo 50 ml (79 EUR), en parfumeries sélectionnées.
   
 

Images: Serge Lutens, Senteurs d'Ailleurs.
  

  

12 commentaires:

Anonyme a dit…

AAh!.. Six, enfin, je me sens un peu moins seule dans la catégorie "je n'aime pas le dernier Lutens" ;)
La ressemblance avec J'Adore m'avais également frappée, mais comme l'a judicieusement souligné Octavian, la version J'Adore L'Absolu est encore plus proche. En le ressentant dernièrement, j'ai trouvé la note d'abricot-osmanthus un peu plus présente en départ, mais ce qui me gêne le plus, c'est cet aspect musqué propre comme un shampooing, tellement banal et éloigné de l'univers Lutens...

Anonyme a dit…

J'abonde en ce sens (celui du shampooing) !
Par ailleurs le rendu osmanthus me semble tellement artificiel comparativement aux 2 parfums de J.C. Ellena par exemple pour Hermès ou The Different Company.
Mais c'est surtout le problème de la cohérence avec la marque qui semble poser problème.

Anonyme a dit…

comme je te l'avais dit dans d'autre lieu, pour moi, c'est l'odeur d'un produit pour nettoyer le sol, agréable mais tellement "ménager".
Impossible pour moi de dire que c'est un parfum, et dieu sait que j'adore Lutens en général mais là, on passe aux lessiviers

Anonyme a dit…

C'est étrange, je m'attendais à être déçue et je suis sous le charme. Un parfum sans prétention mais qui fait ..bon! Avec lequel on se sent bien. Léger mais tenace, un fruité-fleuri qui s'assume. Un joli parfum de printemps.
Cela fait longtemps que Lutens ne m'avait étonnée et charmée. Un revival, même si c'est sur le mode mineur.
Alizarine

Perfumeshrine a dit…

Comme tu le dis, Six, c'est pas mal, mais pas étonnant comme certains autres Lutens du passé. Je partage l'aporie au effet shampooing qu'il sent le propre comme dans Beige d'ailleurs, si même je ne peux pas refuser ses pleasanteries.

Anonyme a dit…

:) Bon, si je résume votre description, en enlevant tout ce qui sert à enjolisver, nous tombons entièrement d'accord "Il me rappelle l'odeur d'un shampoing, et me laisse indifférente".

Je dirais même plus
1) C'est exactement du shampoing "dop"(celui qui pique pas les yeux et évite les noeuds), ni plus ni moins mais avec du sillage.
Jeune j'avais été surpris par la bonne odeur de ce shampoing, et je me suis pencher plusieurs fois sur ma mouillette.
2) Ca m'étonnerait qu'il y ait des matières naturelles dans le shampoing dop, ce qui m'inquiète sur leur quota dans ce Lutens, et si on ne nous prend pas pour des chèvres ?
3) Au final, je trouve que c'est très décevant : pas innovant, fait synthétique, très concensuel, du shampoing à 90€ le flacon, chez Lutens de surcroît.
J'en viens même à moins aimer Sarrasins qui comporte les mêmes notes abricotées.

Avec ce parfum synthétique et commercial (car facile), Lutens baisse dans mon estime, mes attentes sont revues à la baisse et c'est triste.
Seule consolation : 80% de mes préférés n'appartiennent pas à la ligne export des Lutens.

P.S. : Mon impression est confirmée que souvent chez Lutens on a droit à des semi-nouveauté.
Même notes de fruit sec et confits dans "El attarine" "bois et fruit" et ... Même note d'abricot chez "Nuit de cellophane" "Sarrasins" et "daim blond". (Même "serge noir", inclassable tambouille, rejouais sur la cannelle de Rousse)
Les effets d'annonce sont exagérés.

Anonyme a dit…

"et l'ensemble rappelle un peu - hélas - l'odeur d'un shampooing (!!)"

Ohhhh que cela me fait plaisir de lire ceci !!! Ainsi que les commentaires ! C'est exactement ce qui m'est venu instantanément à l'esprit lorsque je l'ai testé !!
J'adore Lutens, je vénère Serge Noire (définitivement mon préféré), mais là euh...oui ça sent le shampooing, le coiffeur, les cheveux propres...
Je n'ai eu qu'une envie, le jour du test, c'est en rentrant chez moi le soir, de m'asperger de Serge Noire...

Anonyme a dit…

je repensais a cette odeur de shampoing, peut etre une reminiscence de ses jeunes années où il etait coiffeur ? un clin d'oeil au passé ? ;)

Unknown a dit…

Comment ose t-on critiquer Serge Lutens, avec autant de facilité, vous tous, amoureux un jour de Serge, car si vous avez trouvé ne serait ce qu'une seule et unique fois dans votre vie un parfum qui est VOUS, alors vénérez son Créateur, sans doute le plus grand parfumeur de ces derniers temps...

Concernant la remarque sur le Shampoing, je ne relèverai même pas...

Serge à un style, un style bien à lui, un style oriental qui s'inspire de tous ces lieux magiques et communs à l'Orient. Je trouve nuit de Cellophane comme ÉVIDENT, la première fois que je l'ai sentie, c'est ce que je me suis dit, il dévoile une légèreté exquise, avec ce quelque chose que nous recherchons tous au fond, et que sans doute nous ne trouvons pas. Les premières notes sont douces et vaporeuses, il est ULTRA sensuel son évidence paraît banale de premier abord mais cette banalité reste intriguante.

Concernant l'odeur du propre, oui il peut rappeler le sillage de ce savon d'autrefois très particulier et très onéreux, que seules les plus fortunés pouvait s'offrir, car oui l'odeur du propre était un luxe...

Pour finir je vous dirais que l'univers de Lutens est vaste, alors ne vous arrêtez pas à quelques parfums que vous connaissez par coeur, évadez vous avec les autres, et vous trouverez l'âme de Serge.

Je l'admet quand on est amateurs de Chergui, d'Ambre sultan, ou encore de Fumerie turque, Nuit de Cellophane peut vous paraître étrange, mais pour les amoureux de Datura noir, Louve ou Amande amère, on retrouve bien là, la signature de Lutens. Cleo ou Jo, une amoureuse de Lutens

Anonyme a dit…

holala , moi qui suis une tamponnée du parfum , je découvre ton blog à l'instat ...je me le mets de coté illico .
bizzzz

Anonyme a dit…

Jo, nous ne sommes pas tous emprunts d'un amour aveugle pour Lutens.
Et il est inutile de relativiser autour de l'odeur du propre, quand la vérité est là.
Tout comme l'orient est un imaginaire prémaché associé aux flacons pour les vendre.

Les parfums Lutens ont des défauts, même si on les aime.
"A la nuit" sent fortement le verni, "Sa majesté la rose" cède vite la place à des notes synthétiques crissantes...
(je connais peu "louve" et "douce amère")
"Ambre sultan" est structuré sur une note perçante omniprésente. Ces défauts sont des éléments du parfum qu'on aime au final.
Autre désillusion pour vous, "fumerie turque" a été reformulé, comme plusieurs autre Lutens.

L'odeur du propre, c'est notre façon de parler de l'odeur de détergent, bas de gamme crissante et monocorde.

Lutens a le mérite de ne pas influencer l'acheteur autrement que par le nom des parfums.
Seulement vous et moi qui lisons beaucoup sur le net, tombons vite dans cette erreur qui consiste à imaginer ce qu'on devrait sentir plutôt que ce qui est vraiment sur la touche parfumée, car il y a une différence. Quand je respire Shalimar, la plupart des lutens, sous mes yeux rien n'est arabisant ni extreme oriental. "Oriental" demeure une appelation commercial. Il n'y a guère que les parfums qui contiennent du santal ou "Rahat loukhoum" qui me donne cette impression.
Toutes -ou presque- les essences de la parfumerie sont exotiques.

Anonyme a dit…

N'est-il pas possible de respecter les gouts de chacun, pour ma part, j'ai découvert il y'a 9 ans Serge Lutens, je suis une amoureuse des parfums, des odeurs, des senteurs...et si je croise une femme ou un homme dont le sillage ne me laisse pas indifférente, je peux lui poser la question : quel est votre parfum ? Et bien on peut être surpris lorsqu’on entend la réponse, car cela peut être une huile sur le corps, un shampoing mélangé à une crème pour le corps, un après rasage sur un homme qui vient de fumer une cigarette...etc...
Tout ça pour dire : l'univers de Lutens est peut-être pour la plupart d'entre vous cantonné à un seul style "oriental" mais créer un parfum est au départ une histoire personnelle, intime, une inspiration...alors si ce parfum ou un autre de la gamme Lutens ne vous séduit pas...tant pis...et peut être même tant mieux… pour certains qui l'adorent...
Ce qui compte c'est que les gens y trouve leur compte, mais il est tellement rare de trouver son parfum, qu'il ne faut pas s'attendre à des miracles, on a beau s'appeler Guerlain ou autre (il y'en a qui me font HORREUR) mais si pour certaines ça évoque de la MAGIE et bien tant mieux, c'est ce qui est formidable dans le monde du parfum.
Pour ma part, il n'y a qu'un seul parfum chez Lutens qui m'a bouleversée, séduite, qui a fait de moi une addict à la limite de la démence...et rien que pour cela, je serai pour toujours reconnaissante envers Serge Lutens, qui en faisant d'une expérience personnelle ou pas...une CREATION dont je ne pourrais me passer jusqu’à la fin de mon existence, car même si j'aime les parfums de manière générale, LE parfum de Serge Lutens qui est aujourd'hui MON PARFUM et ce sera le mot de la FIN