Un mimosa, ça?
Dès qu'il s'agit des joyeux flocons couleur poussin qui finissent de recouvrir la Côte en cette saison, on ne la fait pas à une Niçoise, fût-elle d'adoption. Et vu son nom, on se serait attendu à ce que cette nouvelle édition éphémère d'Annick Goutal soit l'un de ces charmants soliflores naturels dont la maison a le secret... Mais non, pas le moins du monde: dans ce flacon, mon mimosa adoré joue pratiquement les Arlésiennes.
On en crierait presque à la publicité mensongère, puisqu'à vrai dire, la senteur prépondérante qui s'exhale largement, à la vaporisation, c'est celle... d'une belle pêche mûre. Délicate, réaliste, à peine sucrée et duveteuse, mais: une pêche.
Heureusement, le site de la maison vient résoudre l’énigme: "plus qu'une transcription olfactive de la fleur, Le Mimosa en est la perception visuelle et émotionnelle de ses créatrices".
Ouf. D'autant que dans la composition annoncée figure, en bonne liste, le fameux fruit de Prunus persica....
Ma déception n'a d'ailleurs été que purement onomastique. Parce qu'à s'y mieux pencher,
Les parfums Goutal tendent à se regrouper entre beaux parfums classiques, voire un peu "dadame", fascinantes bizarreries (on pense aux formidables Sables, Tubéreuse et autres Eau du Fier), et jolies senteurs qui semblent idéales pour les fillettes. Le Mimosa appartient résolument à cette dernière catégorie: c'est un charmant parfum d'enfance, tout simple et tout en douceur, presque un sent-bon. À la manière d'une Petite Chérie - dont il partage d'ailleurs la tonalité délicatement fruitée-musquée - on l'imagine porté à la fois par les petites filles et par leurs mamans...
Tout fleuri-fruité (voire soliflore pêche) soit-il, Le Mimosa n'en tombe pas pour autant dans la facilité ni le poisseux, qualité Goutal oblige. La maison dépense toujours une fortune en matières premières, et ça se sent. Pas plus de sucre, donc, que dans un fruit mûr: l'accord pêche, largement dominant tout au long de la tenue, est délicieusement réaliste, surtout en tête. Des fleurs de mimosa, le parfum a quand même retenu quelques accents anisés, qui résonnent brièvement en tête. Se devine aussi, après quelques heures, l'effet compact, blanc et crayeux typique des compositions mimosa-cassie (particulièrement affirmé dans Une Fleur de Cassie, chez Frédéric Malle). Mais ce ne sont là que quelques flocons jaunes saupoudrés sur une corbeille de pêches blanches...
À l'évolution, Le Mimosa s’essouffle malheureusement un peu à mon goût, à mesure que le gai chatoiement acidulé du fruit s'estompe et que les muscs blancs prennent du volume, colorant la pêche d'une petite teinte (à mon nez) lessivielle. Et sur ma peau, il s'évanouit un peu trop vite pour que je sente trace des notes boisées promises en fond...
Caveat, donc, pour ceux qui espéraient retrouver les senteurs de la Route du Mimosa dans ce flacon. Mais pour le reste, Mimosa le mal nommé est un parfum charmant, de qualité - mais y a-t-il seulement un parfum griffé Goutal qui ne le soit? Et c'est surtout l'un des très rares fruités sur le marché à ne pas vous donner de caries dès la vaporisation.
À porter comme un rayon de soleil, quand le ciel est gris.
Notes de tête: anis, iris de Florence Notes de cœur: absolu de mimosa de Grasse, pêche Notes de fond: muscs blancs, santal |
Maison: Annick Goutal Créateur: Isabelle Doyen (et Camille Goutal) Année de création: 2011 Famille: fleuri-fruité Disponible en Eau de Toilette, vapo godrons 50 ml (65 EUR) et 100 ml (89 EUR), dans les boutiques Annick Goutal et en points de vente sélectionnés. Édition limitée pour le printemps 2011 (jusqu'à juin?). |
[impression personnelle] tenue +-- sillage +-- |
Images: flacon à godrons (via Annick Goutal); P.-A. Renoir - Gabrielle, Jean et une petite fille, 1896, huile sur toile, 65 x 80 cm, collection Norton Simon, Los Angeles (via The Athenaeum).
4 commentaires:
Arrghhh !!!! Mais en fait je suis totalement perdu avec ce Mimosa (le mal nommé ^^ -> petite anecdote, ça me fait penser à Candide, le bien nommé, qu'on met dans les dissert' ^^) !
D'un côté je l'aime bien : il est bien foutu, surtout dans le naturalisme pêche - mangue. Puis de l'autre, je le trouve pas vraiment utile : il reprend énormément Petite Chérie, il passe mal après Ninfeo Mio (comment passer après Ninfeo Mio ??? That is the question...).
Puis je sais pas. Il y a un petit truc qui me dérange !
Par contre, individuellement, je le trouve beau (j'ai même senti une touche d'iris en fond perso ! Qui donne un aspect "croquant" bizarrement), et je ne comprend pas les gens qui disent que c'est un glucosé dégueulasse ! Non, je vois pas le glucose perso...
Bref, Vive l'odorat ! (and love you !!)
j'avoue avoir étév très déçue également, je ne nie certainement la qualité du travail au niveau es matières etc.. mais alors cette note fruitée de pêche là où on s'attend à sentir un beau mimosa pirntanier et poudré à souhait? Bon après moi j'ai un gros pbm avec les notes fruitées, qu'elles soient bien traitées ou non... mais bon déçue quoi.
Jicky (pardon d'être si horriblement lapin-blanc-d'Alice dans mes réponses, je me noie),
Tu soulèves effectivement un point judicieux, avec le côté un peu redondant de la chose. Mais de fait, comment passer après Ninfeo Mio? J'aimerais bien être petite souris pour connaître les chiffres des ventes chez Goutal, parce qu'on dirait que les dernières sorties avaient beaucoup pour désarçonner les clientes habituelles: les Orientalistes, déjà, puis ces formidables Matin d'Orage et Ninfeo... Et puis bâbord toute, comme un retour aux sources et en terrain balisé avec le trio des roses puis ce non-mimosa si Petite Chérie... enfin, j'espère que le prochain grand lancement bousculera à nouveau un peu la barque!
Ceci dit, individuellement, il reste de très belle qualité, bien entendu. Goutal ne bâcle jamais, et même les références à mon goût les moins intéressantes de la gamme sont de belle facture. Si on pouvait en dire autant de toutes les maisons!
(alors, par contre, le glucose, je ne vois pas du tout! et pas non plus de cumin, chez moi, alors que beaucoup de gens en sentent ici...)
Merci à toi!
Soph,
Oui, je me demande combien de cassiolâtres se seront abondamment vaporisées, pleines d'anticipation, avant de se retrouver le nez dans les pêches, si belles soient-elles!
Je peux comprendre la démarche des créatrices, cette vision poétique plutôt que figurative, mais là, avec un nom de soliflore, le pari m'a l'air quand même un peu risqué... on propose de sortir "La Pêche" qui sente le mimosa? ;)
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