1976.
Le marché de la parfumerie est concentré entre les mains des grandes maisons. Cette année allait voir le lancement de pointures comme First de Van Cleef, et l'ère des opulents à épaulettes rembourrées allait bientôt s'ouvrir.
À l'exception d'une seule petite boutique parisienne, Diptyque, qui propose trois parfums d'épices et d'encens, il n'existe pas de réelle alternative.
C'est alors que Jean(-François) Laporte, un docteur en chimie dont la grand-mère était passionnée de botanique, a une idée: dans un esprit encore hippie, il allait proposer personnellement, dans sa boutique de la rue de Grenelle, de petites eaux de toilette toutes simples en apparence et des senteurs pour la maison. Tournant le dos à ce qui est devenu une industrie du luxe, il prône le retour à la nature et à une certaine forme d'artisanat - d'où le nom choisi pour sa marque: L'Artisan Parfumeur.
Le parfum né d'un choc olfactif, tel que l'odeur des tubéreuses dans un jardin encore humide de pluie, le parfum-émotion, le parfum comme ambiance intime plutôt que comme instrument de séduction: voilà le credo de Jean Laporte. Il conçoit alors des fragrances qui tiennent délibérément du sent-bon, de vraies tranches de nature en flacon, dont il confie la réalisation à un laboratoire de composition.
Ses premières eaux de toilette sont pratiquement des soli-notes, et portent sobrement le nom de leur matériau-phare: Santal, Tubéreuse, Vanilia, Vétiver...
...et ce fut la naissance de la parfumerie de niche.
Malgré leur apparente simplicité, ces premières fragrances présentaient déjà une solide dose d'innovation. Ainsi, Vanilia fut le premier vanillé à utiliser une surdose d'éthyl maltol, la fameuse note "barbe-à-papa" qui rendrait plus tard Angel si (im?)populaire.
Autre création de 1978, Mûre et Musc n'était pas en reste, basée sur l'idée lumineuse de souligner les facettes fruits rouges d'un des nouveaux muscs, le galaxolide, d'une note de mûre. Ce mariage limpide, orchestré par Jean Laporte en collaboration avec Sozio Descollonges, remporta un grand succès, et trente ans plus tard, devenu culte, il reste toujours la meilleure vente de la maison.
L'Eau d'Ambre, La Haie Fleurie du Hameau réalisé par J.-C. Ellena, Les Hespéridés de la Grande Serre, Symphonie de Roses, Lavande Créole, L'Eau du Navigateur, Orchidée Blanche, L'Eau du Caporal hommage à Napoléon,... les sorties se multiplient. Le monde de la parfumerie reconnaît bien vite la nouveauté et la qualité de l'entreprise, et les professionnels défilent dans la boutique, à l'affût d'idées qui feront vite leur chemin ailleurs.
Malgré le succès qui couronne l'enseigne à Paris d'abord, puis à New York, le volet financier suit difficilement, et Jean Laporte se voit contraint de revendre L'Artisan. Il ne renoncera pourtant pas à la parfumerie, et ira fonder une nouvelle marque en 1989, toujours dans un esprit de retour aux sources de l'art du parfumeur: Maître Parfumeur et Gantier.
***
Chez L'Artisan, les choses ne stagnent pas pour autant, témoin la sortie du duo L'Eau des Merveilleuses, aux notes de mangue vanillée, et L'Eau des Incroyables, un prune-tabac épicé, à l'occasion du bicentenaire de la révolution.
Le tournant de la décennie marque l'arrivée d'un tandem à la tête de la marque, Marie Dumont, venue du journalisme, à la direction, et Paméla Roberts, en charge de la direction de la création. Mais la continuité de l'esprit de Jean Laporte est assurée: plus que jamais, il s'agit de créer des fragrances à porter en toute désinvolture, selon la saison ou son humeur du jour, et toujours à mille lieues du leitmotiv des grandes maisons - s'approprier un parfum qui vous ressemble, plutôt que de porter un parfum pour ressembler à son égérie publicitaire.
S'y ajoute désormais un certain parti-pris artistique dans la volonté de proposer de vraies petites madeleines olfactives, des fragrances qui capturent précisément un moment fugace, une sensation, une émotion éphémère. L'Artisan fait alors appel à de grands parfumeurs pour traduire en senteurs l'histoire imaginée.
Ainsi, le style lumineux et poétique d'Olivia Giacobetti sera souvent sollicité, pour créer ces charmantes comptines olfactives que seront Premier Figuier (une sieste en été à l'ombre d'un grand figuier, et le tout premier accord figuier de la parfumerie), L'Eau du Fleuriste (menthe, rose, concombre, ou la fraîcheur de la première senteur qui monte aux narines en entrant chez le fleuriste, la verdeur des tiges dans l'eau mêlée aux fleurs nouvellement arrivées) ou encore Dzing! (nostalgie de l'enfance, c'est toute une visite au cirque qui y est contée: du caramel des friandises à la sciure de la piste, en passant par le cuir des harnais des chevaux et l'odeur des fauves).
Anne Flipo, amoureuse des senteurs vertes et florales, des odeurs d'enfance, sera elle aussi souvent mise à contribution, pour composer d'autres réminiscences olfactives comme le floconneux Mimosa pour Moi (un grand bouquet de mimosas, fleurs, feuilles et tiges, en souvenir d’un week-end sur la Côte d'Azur) ou encore le populaire La Chasse aux Papillons (idyllique senteur d'une course folle dans les prés, parmi les tilleuls et les orangers).
Jean Laporte s'était inscrit à contre-courant en mélangeant, dans sa boutique, les parfums pour soi aux parfums pour la maison. Le nouvel Artisan allait poursuivre sur cette lancée, en proposant toutes sortes de gris-gris parfumés, des "nécessaires à parfumer les courants d'air", ou encore un coffret d'huiles essentielles, baptisé Je me Souviens, qui renfermait des souvenirs olfactifs de cartable, de goûters ou de baisers du soir...
Prolongement de cette idée, des séries et collections vont commencer à être proposées, comme le coffret des Sautes d'Humeur, regroupant cinq parfums d'Olivia Giacobetti à porter selon son humeur du jour: D'humeur jalouse (un vert piquant), D'humeur à rire (fruité bubble-gum), D'humeur à rien (encens), D'humeur massacrante (épicé fumé), et D'humeur rêveuse (musc blanc aldéhydé).
En 2000, remontant aux racines champêtres de L'Artisan, le trio Je t’ai Cueilli une Fleur d'Anne Flipo réunissait trois soliflores, Jacinthe des Bois, Verte Violette et Œillet Sauvage. À l'opposé, le coffret des Épices de la Passion sorti deux an plus tard regroupait trois fragrances librement inspirées d'anciennes recettes destinées à éveiller les sens: Piment Brûlant et Poivre Piquant, de Bertrand Duchaufour, et Safran Troublant, d'Olivia Giacobetti.
Des éditions limitées d'été sont aussi proposées, comme Fleur de Carotte ou Un Zeste d’Été; parfois, elles peuvent rejoindre la collection permanente (ce fut le cas par exemple de Thé pour un Été ou Ananas Fizz).
Faut-il y voir une réaction au reproche souvent adressé à la gamme, la fugacité de ses fragrances? Des déclinaisons en eau de parfum des plus populaires commencent à voir le jour: Mûre et Musc Extrême, suivie d'Ambre Extrême, de Premier Figuier Extrême et de La Chasse aux Papillons Extrême. Plus tard, pour fêter son trentième anniversaire, la vedette Mûre et Musc sera même proposée en extrait de parfum.
***
En 2002, l'extension de L'Artisan est remarquable: la marque compte 600 points de vente dans le monde, dont 178 en France. Et son rachat l'année suivante par le fonds d'investissement américain Fox Paine and Company, via sa filiale Cradle Holdings (déjà propriétaire de Penhaligon's), va signaler le début d'une stratégie d'expansion plus importante encore.
Ainsi, 2003 marque l'ouverture de la Grande Boutique, sise rue de l’Amiral Coligny, face au Louvre. Dans ses 160m2, le chaland peut découvrir tous les produits de L'Artisan, mais aussi participer à des ateliers olfactifs organisés plusieurs fois par mois, sélectionner des des cadeaux d’invités parfumés personnalisés, se faire composer son propre parfum sur mesure, etc.
La même année voit la naissance de la très belle série des Odeurs volées par un parfumeur en voyage, toute d'originalité fine et interpellante: son premier tome est le curieux Bois Farine de J.-C. Ellena, à la senteur de cacahuète(!). Viendront ensuite les superbes Timbuktu, accord boisé-épicé de karo-karoundé et de vétiver, et Dzongkha, l'odeur d'un monastère du Bhoutan, ou plus récemment le vert Fleur de Liane, tous réalisés par Bertrand Duchaufour.
En 2005, c'est le lancement d'une série au positionnement nettement plus luxueux que le reste de la gamme: des parfums enchâssant comme des joyaux l'absolue extraite de la récolte exceptionnelle de l'une ou l'autre fleur, chacun millésimé et édité à 3000 flacons seulement. À Fleur d'Oranger 2005 succéderont Fleur de Narcisse 2006 puis Fleur d'Oranger et Iris Pallida 2007.
En 2005 toujours, soit deux ans à peine après le rachat, Cradle Holdings libère L'Artisan, désormais à nouveau une société indépendante - mais qui poursuivra sur cette lancée à présent plus bobo que baba. Le design des flacons est retravaillé, "pour les rendre plus luxueux dans les petits détails". Des fragrances spéciales en éditions limitées sont créées pour des marques, comme l'ultra-exclusif Ambroisie ArArAt (10 flacons!) pour les cognacs Ararat, L'Eau du Printemps aux senteurs de rose, de jacinthe et de pollen pour les grands magasins éponymes, le masculin épicé L'Échange pour la boutique du Royal Exchange, ou encore Aedes de Venustas, du nom d'une parfumerie new-yorkaise.
L'Artisan va aussi se lancer dans le secteur du bio, proposant d'abord, en 2007, la ligne Jatamansi, toute une gamme de soins construite autour de la senteur surprenante d'une plante mythique: le nard de l’Himalaya. Une deuxième eau de toilette bio suivra en 2009, la marine Côte d'Amour.
Mi-2008, la nouvelle tombe: le talentueux Bertrand Duchaufour, qui collaborait régulièrement avec la marque depuis le lancement dix ans plus tôt du délicieux boisé-gourmand Méchant Loup, va devenir en quelque sorte le parfumeur-maison de L'Artisan, chargé de la création des parfums sur mesure et "d’autres projets olfactifs".
La continuité a été garantie par une direction olfactive toujours assurée par Paméla Roberts - jusqu'à il y a peu. On assure, chez L'Artisan, que la maison pourra toujours faire appel à d'autres créateurs; le tout dernier lancement, Cœur de Vétiver Sacré, a d'ailleurs été composé par Karine Vinchon, déjà auteur de L'Eau de Jatamansi. Corollaire, Bertrand Duchaufour pourra lui aussi continuer à collaborer avec d'autres marques, comme son récent Amaranthine pour Penhaligon's.
C'est en tout cas à lui qu'a été confiée la composition de la série Mon Numéro, au départ conçue comme un équivalent de la Collection Privée de Guerlain: des créations uniques qui, une fois choisies, resteraient pour toujours la propriété exclusive de leur heureux acquéreur. Le Numéro 2 a trouvé preneur; restaient le Numéro 1 (poire-mimosa), le Numéro 3 (fleuri-musqué poudré), le Numéro 4 (lavande cuirée), le Numéro 6 (après la mousson: fruité-épicé-cuiré-boisé-ozonique), le Numéro 7 (voyage en Inde: tubéreuse, jasmin, chaï), et le Numéro 8 (vétiver).
Cette stratégie d'expansion massive et de repositionnement "luxe", désormais bien loin de l'héritage de Jean Laporte (décédé fin 2011), a-t-elle été payante? À en croire les rumeurs, il semble du moins qu'après une période de forte croissance, de nombreux points de vente aient commencé à fermer, en tout cas en Australie et aux États-Unis. Et la série Mon Numéro, privée du 2 (et, icône Chanel oblige, du 5), mais étoffée d'un 9 (Cologne verte fraîche) et d'un 10 (oriental chaleureux) a récemment perdu son exclusivité pour être proposée à un plus large public: chaque numéro est réservé à une ville/partie du monde, mais la collection complète est disponible dans les cinq boutiques parisiennes (et sur Internet).
Il n'en reste pas moins qu'après une petite période de flottement, avec des parfums qui surfaient sur la vague plutôt que de l'anticiper, les dernières sorties de L'Artisan Parfumeur allient à présent une qualité remarquable à une inventivité certaine: les superbes Vanille Absolument, Nuit de Tubéreuse et Traversée du Bosphore ont placé la barre très haut. Si L'Artisan continue sur cette lancée, l'avenir artistique de la maison s'annonce radieux.
La continuité a été garantie par une direction olfactive toujours assurée par Paméla Roberts - jusqu'à il y a peu. On assure, chez L'Artisan, que la maison pourra toujours faire appel à d'autres créateurs; le tout dernier lancement, Cœur de Vétiver Sacré, a d'ailleurs été composé par Karine Vinchon, déjà auteur de L'Eau de Jatamansi. Corollaire, Bertrand Duchaufour pourra lui aussi continuer à collaborer avec d'autres marques, comme son récent Amaranthine pour Penhaligon's.
C'est en tout cas à lui qu'a été confiée la composition de la série Mon Numéro, au départ conçue comme un équivalent de la Collection Privée de Guerlain: des créations uniques qui, une fois choisies, resteraient pour toujours la propriété exclusive de leur heureux acquéreur. Le Numéro 2 a trouvé preneur; restaient le Numéro 1 (poire-mimosa), le Numéro 3 (fleuri-musqué poudré), le Numéro 4 (lavande cuirée), le Numéro 6 (après la mousson: fruité-épicé-cuiré-boisé-ozonique), le Numéro 7 (voyage en Inde: tubéreuse, jasmin, chaï), et le Numéro 8 (vétiver).
Cette stratégie d'expansion massive et de repositionnement "luxe", désormais bien loin de l'héritage de Jean Laporte (décédé fin 2011), a-t-elle été payante? À en croire les rumeurs, il semble du moins qu'après une période de forte croissance, de nombreux points de vente aient commencé à fermer, en tout cas en Australie et aux États-Unis. Et la série Mon Numéro, privée du 2 (et, icône Chanel oblige, du 5), mais étoffée d'un 9 (Cologne verte fraîche) et d'un 10 (oriental chaleureux) a récemment perdu son exclusivité pour être proposée à un plus large public: chaque numéro est réservé à une ville/partie du monde, mais la collection complète est disponible dans les cinq boutiques parisiennes (et sur Internet).
Il n'en reste pas moins qu'après une petite période de flottement, avec des parfums qui surfaient sur la vague plutôt que de l'anticiper, les dernières sorties de L'Artisan Parfumeur allient à présent une qualité remarquable à une inventivité certaine: les superbes Vanille Absolument, Nuit de Tubéreuse et Traversée du Bosphore ont placé la barre très haut. Si L'Artisan continue sur cette lancée, l'avenir artistique de la maison s'annonce radieux.
Parfums de L'AP actuellement disponibles:
- Al Oudh (edp)
- Batucada (edt) nouveauté
- Bois Farine (edt)
- Côte d'Amour (edt) *bientôt retiré de la vente*
- Coeur de Vétiver Sacré (edt)
- Drôle de Rose (edt)
- Dzing! (edt)
- Dzongkha (edt)
- Fleur de Liane (edt)
- Fou d'Absinthe (edp)
- La Chasse aux Papillons (edt) - La Chasse aux Papillons Extrême (edp)
- L'Eau d'Ambre (edt) - Ambre Extrême (edp)
- L'Eau de L'Artisan (edt)
- L'Eau du Navigateur (edt) *bientôt retiré de la vente*
- L'Eté en Douce (edt) (?)
- Méchant Loup (edt)
- Mimosa pour Moi (edt)
- Mon Numéro n°1-3-4-6-8-10 (edp) nouveautés, disponibles à Paris et sur Internet
- Mon Numéro n°9 (edt) nouveauté, disponible en Europe
- Mûre et Musc (edt - extrait) - Mûre et Musc Extrême (edp)
- Navegar (edt) *bientôt retiré de la vente*
- Nuit de Tubéreuse (edp)
- Passage d'Enfer (edt)
- Patchouli Patch (edt)
- Piment Brûlant (edt)
- Poivre Piquant (edt)
- Premier Figuier (edt) - Premier Figuier Extrême (edp)
- Safran Troublant (edt)
- Tea for Two (edt) *bientôt retiré de la vente*
- Thé pour un Eté (edt)
- Timbuktu (edt)
- Traversée du Bosphore (edp)
- Vanille Absolument (edp - anciennement Havana Vanille)
- Verte Violette (edt)
- Voleur de Roses (edt) (?)
A venir: le prochain lancement, prévu au printemps, serait un fleuri signé par Bertrand Duchaufour.
Dernière mise à jour: 25 janvier 2012.
Sources: Annick Le Guérer - Le Parfum: des origines à nos jours; article de Luca Turin; Osmoz; interview de Paméla Roberts; interview d'Anne Flipo; interview de Bertrand Duchaufour; entretien de Bertrand Duchaufour avec Annick Le Guérer, interview de François Duquesne; A Minx By Any Other Name; Bois de Jasmin; Beautypackaging; Cosmetics International; European Luxury Blog; Perfume Intelligence, Basenotes.
Images: Now Smell This, A Minx By Any Other Name, Feelgoodstyle, What we do is secret, Sniffapalooza.
15 commentaires:
Merci Ambregris pour cet hommage à cette marque qui est je crois celle que j'affectionne le plus personnellement. Je viens d'apprendre que l'Artisan Parfumeur enait tout juste de changer de propriétaires (c'est tout récent)! En espérant que la course au chiffre ne l'emporte pas sur l'esprit encore intègre de cette marque qui a su développer une identité forte, fidèliser sa clientèle et conserver tout de même un peu de la flamme du départ. Cela dit, fermer quelques boutiques n'est pas un mal à mon sens, car il vaut mieux se concentrer sur quelques beaux points de vente où l'on a plaisir à venir que trop s'éparpiller. Quant aux parfumeurs, espérons qu'ils collaborent toujours car, que demander de plus, ce sont les plus grands créatifs !! Méchant Loup.
Juste pour actualiser la liste : Fleur de Narcisse, Iris Pallida, Ananas Fizz vivent leurs derniers instants et sont actuellement soldés.
Méchant Loup,
Alors là, je n'avais pas entendu parler de cette reprise! Tu pourrais m'en dire plus?
Je suis entièrement d'accord avec toi pour un recentrage, j'ai l'impression que L'Artisan s'était un peu éparpillé ces derniers temps (rien qu'à Lille, il y a deux points de vente à quelques minutes de marche l'un de l'autre!). Reste à savoir si ces fermetures sont un choix de concentration ou le signe de l'échec d'une trop grande expansion - et là, je ne me prononcerai pas, je n'en sais rien.
J'ai aussi le sentiment, tout à fait personnel, qu'au final, une partie des intentions de Jean Laporte se sont perdues en route, malgré tout... mais quoi qu'il en soit, les dernières sorties ont généralement été très belles (j'aime particulièrement Dzongkha, fantastique, et Timubktu), donc à ce niveau, aucun souci à se faire, en tout cas!
Même si les prochaines sorties sont manifestement aussi de Bertrand Duchaufour, j'aimerais aussi beaucoup revoir Olivia Giacobetti chez L'Artisan, elle y a fait de si belles choses...
Thierry,
Je savais pour les deux éditions "millésimes", pas pour Ananas Fizz... encore un qui s'en va!
Et je me demande si Tubéreuse est aussi menacée, puisqu'une des prochaines sorties de B.Duchaufour pour L'Artisan est précisément une tubéreuse?
Merci d'être passé ici!
Oui, d'après mes sources, Tubéreuse serait bien menacée, pour éviter les "doublons", au même titre que Vanilia....
En ce qui concerne les boutiques à Paris, il y a en a eu deux pendant quelques mois rue des Francs-Bourgeois dont l'une qui remplaçait Penhaligon's, alors qu'une troisième se trouvait rue du Bourg Tibourg, dans le même quartier du Marais : il y a un moment ou la clientèle n'est pas extensible à l'infini...
Je suis moi aussi un fan de Dzing d'O. Giacobetti, ce qui n'enlève rien au talent de B. Duchaufour.
Thierry,
C'est fort dommage... si cette nouvelle tubéreuse est aussi peu soli-note que l'est Havana Vanille, les deux auraient très bien pu coexister! Enfin, je dois dire que je suis impatiente de sentir cette nouveauté, et encore plus l'oriental-ambré promis...
Et pareil pour Dzing!, un petit bijou d'inventivité, pour moi dans les meilleurs de la gamme.
Cette marque a une place spéciale dans mon coeur, elle a marqué mes 1er pas en parfumerie (merci PoivreBleu). On y trouve le plaisir simple de sentir, de la qualité, de l'authenticité et du naturel, de l'originalité et de la surprise, de l'innovation, et surtout des chef d'oeuvres.
Toute une connivence entre moi-client et le nez.
Autant d'élément que je ne retrouve pas chez "Maître parfumeur et gantier" ou "Penhaligon" qui sont pour moi des marques comme les autres, en dépit des comparaisons. Mais je réessaierai.
On croit les marques de modes immortelles, mais leur histoire est jalonnée de disparition du jour au lendemain. Elles sont bien vivantes, fragiles, et doivent composer avec l'air du temps. Aussi ces changements de main ne me choque pas. Puisqu'ils n'ont pas entravé la qualité et l'innovation.
Par contre ils ont affecté les prix. A rajouter 10€, puis 10€, les mêmes parfums sont passé d'abordables à chers. Où est passé l'esprit du plaisir désinvolte ? La marque semble parfois ne plus s'adresser au commun des mortels.
Les mêmes parfums, beaux au demeurant, souffrent toujours de leur fugacité (ah... safran troublant), et sur le terrain des marques de luxe, où le choix comme la compétition est grande, je me tourne plus volonté vers d'autres marques. Dommage.
P.S. : Olivia Giacobetti, j'apprécie son travail aussi, mais elle a changé de style. Nous espérons peut-être en vain. Elle se
Julien,
Je crois que L'Artisan occupe une place à part dans le cœur de beaucoup de perfumistas, avec son image de créateur de senteurs simples et poétiques qui, justement, ont du cœur. Je ressens par contre une évolution vers des parfums plus intellectualisés, plus loin de cet esprit un peu "roots" du départ. Je ne le déplore pas, remarque, puisque ça a donné des Dzing!, Timbuktu et mon bien-aimé Dzongkha... (je raffole aussi de Safran Troublant, si simple en apparence mais si beau, si caressant)
Et comme tu le soulignes, le prix a suivi le mouvement, et c'est très dommage. Je dois maintenant réfléchir à deux fois avant de craquer pour un flacon, on n'est plus dans l'esprit "petit plaisir" des débuts...
Pour Olivia Giacobetti, tu m'intrigues - dans quel sens dirais-tu que son style a évolué?
Moi aussi j'hésite plus longtemps avant de craqué pour un l'AP. Les 50ml ont un prix au ml trop élevé, et 100ml c'est beaucoup quand on a déjà toute une collection de parfums (d'ailleurs "al oudh" " et "havana vanille" n'existent qu'en 100ml).
Inversement, quand je me ballade chez "Parfums de Nicolaï", mes billets flambent littéralement sur leurs flacons de 30ml, je fais des stock cadeaux, et j'achète même ceux qui me plaisent moins pour les avoir tous. J'en achète 2 fois plus que prévu.
C'est assez paradoxal que chez l'AP j'aime plus qu'ailleurs le design de leurs flacons, la qualité des fragrances, l'esprit, mais que sur le prix ça coince.
Je ne sais pas... Une marque qui a invité au plaisir, désinvolte et décomplexé de se parfumer, doit comprendre qu'elle a attiré une clientèle curieuse qui aime changer de parfum. L'AP devrait plus nous mettre en mesure d'acquérir des petits flacons différents que de nous pousser à investir sur 100ml. (Si je tiens compte de leur tarif (30ml resterait autour de 45€ : hic), alors le seuil psychologique serait des flacons de 20ml pour 35€, et là je ne me retiens pu, j'en achète 6-7-8, fait un stock cadeau par dessus... alors qu'actuellement, niet, que dalle)
Quand j'ai dit qu'Olivia Giacobetti changeait de style, j'ai fait une bourdasse (je la créditais du parfum "eau d'hivers" (qui est de JC Ellena) et du coup je pensais qu'elle virait minimaliste). Elle a toujours fait des compositions subtiles. Le seul truc que je peux hasardeusement avancer, c'est que ses nouvelles compositions me semblent offrir un plaisir moins accessible.
Personnellement j'ai beaucoup aimer la réédition de l'Ether (mais encore un problème de gros flacon), et c'est donc du côté des rééditions chez IUNX que ma curiosité est encore toute excitée
Je rejoins Julien concernant le prix trop élevé et d'ailleurs c'est un coup de gueule général concernant les "niche". Comme je le disais sur graindemusc, je serais d'accord de payer 20% ou 30% plus cher un parfum pour la qualité et ne pas le sentir sur tout le monde à chaque coin de rue, mais pas le double, voire le triple. Reste que l'AP reste un des raisonnables, à moins de 100 euro les 100ml.
Je n'ai malheureusement pas pu découvrir toute la gamme lors de mes rares passages à Paris, mais mes coups de coeur sont allés à Safran Troublant, Verte Violette, Mimosa pour moi, l'Eté en douce et Mûre et Musc extrême! J'aime aussi beaucoup Drôle de Rose, mais je lui préfère Lipstick Rose de Malle!
Clochette,
Je comprends votre agacement sur les prix des niches. Je me pose d'ailleurs assez souvent la question, ces temps-ci - est-ce qu'un parfum "vaut" son prix? Pour les niches, c'est très difficile à dire, on paie bien entendu l'exclusivité, mais aussi le coût accru de production, les matières plus chères (quand les marques jouent le jeu, bien sûr), le talent du créateur...
Ceci dit, quand on voit le prix que peuvent atteindre certains parfums de niche, les super-exclusifs de Guerlain et autres, (et ça continue de grimper!), ça laisse rêveur, c'est sûr.
Et c'est vrai que finalement, L'Artisan (et mine de rien, Lutens!) reste dans les plus "abordables"... et Safran Troublant a aussi été un très grand coup de cœur pour moi, il est unique!
Merci d'être passée ici!
Sixtine,
Merci pour cette belle fresque !
On a tous quelque chose de l'Artisan !
Ses créations ont jalonné ma vie parfumée depuis plus de vingt-cinq ans.
Je me rappelle avec le plus d'émotion peut-être les savons à la tubéreuse. Leur merveilleuse odeur lactée persistait longtemps dans l'étui après leur disparition… A l'époque j'avais choisi l'eau de toilette "Pamplemousse" et ma meilleure amie "L'Eau du Navigateur", que j'ai retrouvée récemment, adoptée par un ami devenu fan de ses épices, de ses bois et de sa note café...
Puis il y a eu "Tubéreuse" et "Dzing".
Ma mère déplore toujours quant à elle la disparition des "Lilas de Trianon", ce magnifique lilas miellé, plus vrai que nature, dont elle n'a jamais trouvé l'équivalent.
Il m'arrive à présent de porter "Safran Troublant", dont j'ai eu beaucoup de mal à savoir si je l'aimais ou pas ! De fait, chez moi, c'est plus la rose que le safran qui domine (mais ça dépend des jours !), et il m'arrive d'y déceler une note de cardamome, dont on ne peut pas dire que j'en raffole (comme en cuisine). De même, la finale ne me satisfait pas ; elle présente un côté "sale" que je serais bien en peine de définir... Je ferais le même reproche à "Dzing", c'est pourquoi je ne l'ai pas racheté (mais cela m'ennuierait qu'il disparaisse : on ne sait jamais !).
Cela dit j'ai volontiers porté "Safran" lors des grands froids : il était le seul à ne pas être "cassé", contrairement à "L'Heure Bleue" et à "Cuir Mauresque", qui perdaient en acuité et en ampleur je trouve. Il m'a bien enveloppée et réchauffée...
Je regrette aussi que la marque ait évolué vers quelque chose de luxueux, contraire à l'esprit un peu frondeur de ses débuts, pour se faire l'égale de maisons prestigieuses... et revendiquer des prix en conséquence !
Mais il est vrai que l'Artisan est toujours un esprit et que je reste curieuse de ses nouvelles créations...
Rafaèle,
Pareil, je regrette la disparition de ces petits plus, les savons, les gri-gri, il y avait là comme un esprit ludique, champêtre, qui est parti... et la discontinuation de beaucoup (trop!) de parfums, aussi. C'est pénible de s'attacher à un parfum, et de toujours craindre qu'il disparaisse... pour te dire, je n'ai même jamais croisé ce Lilas, qui m'a l'air très joli, à ce que tu en dis! (comment le placerais-tu par rapport à En Passant, chez Malle? Moins humide, apparemment?)
Safran Troublant, je comprends qu'il faille le temps de s'y habituer (moi, je voyais les moules en accompagnement, au début! ;))
Pas de note sale, non plus, sur moi, il est de plus en plus caressant... par contre, je la sens bien dans Dzing! (qui prend aussi, par ailleurs, des allures de vinyle au départ, sur ma peau!)
Le tournant chez L'Artisan, à la fois je le déplore - cet esprit "sent-bon" et poétique était charmant - et en même temps, il a fait place à une recherche olfactive que j'aime beaucoup, comme je l'ai dit plus haut: la série des Voyages est vraiment très réussie, et j'adore vraiment leur dernière Havana Vanille... j'aime moins la nouvelle politique de prix, par contre! ;)
Et à venir, donc, semble-t-il: une tubéreuse, un vétiver et un oriental ambré... j'ai hâte!
Sixtine,
J'ai senti "En passant" il y a assez longtemps mais dans mon souvenir le lilas était beaucoup plus présent dans "Les Lilas de Trianon" ; il apparaissait sous un autre "angle", celui du bouquet de lilas fraîchement cueilli par une journée ensoleillée. L'esprit, le traitement était différent. Il faudra que je me penche à nouveau sur "En passant" (si j'ose entrer chez Ombres Portées en sachant que je vais sortir les mains vides ;-(...).
Pour en revenir à l'Artisan, je me suis promis de re-sentir "Havana Vanille" que j'ai humé en vitesse, juste le temps d'inhaler cette bouffée de "Clan" ou d'"Amsterdamer" que j'ai trouvée attrayante... Il faudra que je me fasse une meilleure idée de l'ensemble... Tout en étant fan de Lutens, j'aime aussi la démarche de recherche qui sous-tend ces créations.
Rafaèle,
Effectivement, le traitement du lilas dans En Passant est subtil, on y sent autant les gouttes de pluie que la fleur... il reste à mon goût absolument ravissant, mais il est certainement aussi aqueux que fleuri. Le marché manque décidément d'un bon soliflore lilas!
Le Havana Vanille... tu l'auras compris, il m'a conquise - et pour que je craque pour une vanille, il faut vraiment y aller! ;)
En plus du tabac, cette note presque incongrue de narcisse est vraiment intéressante, c'est une composition bien pensée... tiens-moi au courant!
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